Film recommandé: « Always – Pour toujours »
Anges emprisonnés
Vous vous souvenez de ce film, qui avait un couple très passionné, puis le gars est mort et est revenu pour résoudre des problèmes? Ah! Il y avait encore une chanson des années 50, très belle … Si vous avez pensé à « Ghost », vous vous trompez totalement. Je parle de « Always – Pour toujours », avec Richard Dreyfuss et Holly Hunter, réalisé par Steven Spielberg.
Pour ceux qui ne le savent pas, ce film est le remake de « Un nommé Joe » (« A Guy Named Joe », EUA, 1943), avec Spencer Tracy et Irene Dunne dans les rôles principaux. C’est l’un des rares cas où la copie a été meilleure que l’original. D’un film à l’autre, ce qui a changé, c’est l’ambience. Alors que l’histoire originale se déroulait au milieu de la Seconde Guerre mondiale, « Always – Pour toujours » montre la lutte des pompiers aériens pour éteindre les incendies dans les forêts.
Pete (Richard Dreyfuss) est un pilote audacieux et passionné par son métier, tandis que sa petite amie Dorinda (Holly Hunter) le supplie toujours de quitter ce travail aussi dangereux. Une de ces fois, Pete a un accident et meurt. Un ange (Audrey Hepburn, dans l’une de ses dernières apparitions dans le cinéma) le ramène au monde pour inspirer un jeune pilote. Il s’avère que le garçon est amoureux de Dorinda, ce qui permet à Pete de découvrir sa véritable mission: résoudre les problèmes en suspens qu’il a laissé, à sa mort.
C’est un film où tout s’est bien passé. L’histoire est romantique et attachante. Le duo principal est très inspiré et possède une chimie parfaite. Les paysages sont magnifiques et les tournages de les incendies de forêt sont à couper le souffle. La chanson « Smoke Gets In Your Eyes », un grand succès de The Platters, 1959, joliment empreint d’histoire.Et il y a aussi l’amusant John Goodman qui fait le contrepoint comique du film.
La comparaison avec « Ghost » est inévitable en raison des similitudes entre les deux films, bien que « Always – Pour toujours » soit sorti un an plus tôt. La différence fondamentale réside dans le traitement réservé aux personnages et dans l’idéologie intégrée dans les films. Dans « Ghost », il règne une atmosphère de sensualité et de violence. Dans ce film, le « défunt » Swayze enquête et venge sa propre meurtre. Comme elle est américaine, blanc, beau et blond, il va quand même au paradis. En autre, le bandit, latin, brun et laid, n’échappe pas à se laisser traîner par les ombres de l’enfer.
« Always – Pour toujours » est très différent. Combattant les flammes infernales des incendies, en règle générale pour sauver les pompiers qui agissent sur le terrain, les personnages principaux sont angéliques. Tous sont contenus et asexués. Le maximum d’affront que l’on voit sont les ébats du caractère de Dreyfuss avec ce de Goodman.
Cette caractéristique du film est visible dans la scène où Dorinda, à l’anniversaire de la mort de son petit ami, porte le même vêtement blanc et virginal qu’il lui avait donné, et danse seule au son de « Smoke Gets In Your Eyes ». Pete danse avec elle, les deux sans se toucher, comme des anges. Cela pourrait être classé comme ringard, et quiconque le fait, sera couvert en raison. Ridiculement sentimental, mais merveilleusement romantique.
Le film, dans cette délicieuse tarabiscotage, met en valeur la bonne partie de notre âme, tellement étouffée par le matérialisme de ces jours troublés que nous vivons. Entre trumps et bolsonaros, attaques terroristes et allégations de corruption, nous cessons d’exercer la caractéristique humaine fascinante d’être ému par le bien, le pur, l’éthique. Rien de moins que la partie ange, qui existe en chacun de nous.
Que diriez-vous de regarder le film, l’esprit ouvert, sans supprimer les émotions, ne rien laisser sortir? Souvent, nous devons utiliser l’excuse d’un film romantique pour libérer les émotions emprisonnées. Vous verrez que cela en vaudra la peine.
C’était le troisième film que Spielberg et Dreifuss ont fait ensemble. Précédemment, il y eu « Les dents de la mer » (« Jaws », EUA, 1975) et « Rencontres du troisième type » (« Close Encounters of the Third Kind », EUA, 1977). Et, en preuve que parfois la vie imite l’art, en 1989, il y a eu un grand incendie dans le célèbre parc de Yellowstone, dont les scènes ont été enregistrées dans « Always – Pour toujours ». Holly Hunter atteindra sa majorité dramatique peu après avec le magnifique film « La leçon de piano » (« The Piano », EUA, 1993), qui lui valut un Oscar bien mérité.